En 2001, Charles Franchi est embauché comme administrateur système dans l’entreprise Team Partners à Levallois (92), filiale de Team Partners Group (Vincennes 94), dont l’activité était l’infogérance, l’entretien et le suivi des parcs informatiques de sociétés clientes.
Il se syndique en 2004 à la CFTC, puis il est élu au Comité d’entreprise et nommé délégué syndical. En 2011, son entreprise est rachetée et cédée à la société Feel Europe Groupe. En 2014, les derniers rescapés de ces restructurations sont licenciés. Charles Franchi revient sur ce parcours qui dure depuis plus de dix ans et pour lequel les salariés ont entamé des procès afin de contester les licenciements qui s’en sont suivis. Témoignage.
En 2011, les sociétés CGBI, Team Partners Group et Team Partners ont été reprises (partiellement ou intégralement) par la société Feel Europe Groupe. J’intègre alors la filiale Feel Europe TPG.
À la suite d’un important contrat perdu, Feel Europe TPG décide d’opérer diverses cessions vers d’autres filiales de Feel Europe Groupe. Cela implique des transferts de salariés, des transferts d’activités vers d’autres filiales et des cessions de clientèle. Démissions, ruptures conventionnelles, pressions… tout est fait pour “dégraisser”.
Deux ans après la reprise par Feel Europe TPG, seuls les salariés les plus compliqués à licencier de l’ex-société Team Partners (ceux protégés, de plus de 55 ans, en intercontrat, placés sur des contrats à trois mois) sont conservés, soit à peine 67 salariés sur les 496 du départ. Puis, cette même année, 2013, Feel Europe TPG est cédée à la société People IT HLD (repreneur indépendant en grosse difficulté financière). Celle-ci prend alors le nom de TPG-IT. Feel Europe Groupe soutient financièrement TPG-IT jusqu’en janvier 2014. En avril 2014, TPG-IT est placée en redressement judiciaire, puis liquidée en juillet… les derniers salariés sont licenciés en septembre de la même année, avec l’accord de la DIRECCTE. L’AGS indemnise les salariés.
Trois procédures distinctes sont alors lancées :
• Au Tribunal Administratif
• Au Tribunal de Commerce
• Au Tribunal des Prud’hommes
Au Tribunal Administratif
La décision d’homologation du PSE est contestée par les anciens salariés, qui considèrent que le licenciement économique aurait dû se faire au niveau de Feel Europe Groupe et non de la filiale TPG-IT. En effet, Feel Europe Groupe est soupçonnée d’avoir organisé le démantèlement puis l’insolvabilité de TPG-IT pour ne pas avoir à supporter le coût de la réorganisation et des licenciements. Les instances administratives saisies ont annulé à trois reprises la décision d’homologation du PSE (Tribunal Administratif, Cour Administrative d’Appel, Conseil d’Etat) au motif que la DIRECCTE n’avait pas suffisamment justifié et motivé celle-ci.
Au Tribunal de Commerce
L’administrateur et le mandataire judiciaires constatant certaines irrégularités de gestion saisissent le Tribunal de Commerce en juin 2014. Une procédure gagnée en première instance. Dans un jugement d’octobre 2017, le tribunal de commerce de Créteil reconnaît une faute sociale et fiscale engageant la responsabilité de Feel Europe et la condamne. Feel Europe fait appel de ce jugement. Contre toute attente, la cour d’appel donne raison à SII (qui a absorbé Feel Europe Groupe en novembre 2019) le 11 mai 2021, arguant que les conditions n’étaient pas réunies pour engager la responsabilité de Feel Europe. Fait extraordinaire, la cour d’appel a également condamné la quarantaine d’anciens salariés qui s’étaient portés intervenants volontaires – l’équivalent de partie civile – à payer chacun à SII, la somme de 100 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Une condamnation que SII semble vouloir faire appliquer, puisque la société de services a fait parvenir à chacun d’eux une notification d’huissier pour les enjoindre de payer.
Au Tribunal des Prud’hommes
Quarante anciens salariés, dont je suis, nous nous sommes engagés dans une procédure prud’hommale à l’encontre de SII et nous demandons une réintégration dans l’effectif. Pour nous, ce n’est pas un rachat qui s’est effectué en 2013, mais un licenciement déguisé. Cette procédure, engagée dès 2013, n’est toujours pas jugée, le tribunal des Prud’hommes ayant souhaité attendre le jugement d’appel du Tribunal de commerce pour se prononcer. Aujourd’hui, je ne me sens pas amer, j’aimerais tourner cette page, et reprendre une vraie activité. J’ai fait une reconversion professionnelle et pense à une VAE Syndicale pour valoriser mon parcours. J’ai des compétences en comptabilité, informatique de gestion. Aussi, si vous entendez parler d’un poste vacant, contactez-moi via la fédération ! » ■