Comment renouveler le syndicalisme ?

07 février 2022 Fédération Syndicats

La CFTC Media+ a interviewé la sociologue Cecile Guillaume, spécialiste des questions des syndicats en France et en Grande Bretagne.

« Depuis 20 ans, j’observe le syndicalisme, que ce soit en France ou en Grande Bretagne, et son évolution. Et je vois des similitudes.  Le faible nombre de personnes syndiquées par exemple.

Le profil d’un permanent syndical type ? Issu d’une profession intermédiaire, homme (ou femme dans les secteurs féminisés), blanc et d’un âge assez avancé.

Aujourd’hui, pour pallier la pénurie de mandatés, les Organisations Syndicales doivent travailler sur les questions du sexisme, du jeunisme, de la cooptation, du niveau des qualifications, des origines. Dans les métiers peu qualifiés, où il y a peu de syndicalistes, les personnes peu qualifiées et d’origines diverses sont surreprésentées.

Pourtant, aujourd’hui, toutes les volontés sont bonnes à prendre.

Comment rajeunir ?

La lutte des classes entre jeunes et anciens syndicalistes s’est amoindrie depuis 20 ans, mais la question centrale est le manque d’intérêt des jeunes salariés pour le syndicalisme.

2 raisons principales :

  • Être syndiqué peut ralentir une carrière. Et c’est malheureusement vrai, la différence de salaire entre un collègue syndiqué et un autre collègue non syndiqué dans la même entreprise est de 30% au bout de 20 ans de syndicalisme.
  • Avec la décentralisation de la négociation collective et la réforme des IRP, exercer un mandat syndical demande une vraie expertise. Il faut être à la fois couteau suisse, savoir tout faire, mais tout en ayant de nombreuses compétences et connaissances. Cela peut faire peur, et limiter les bonnes volontés.

Les raisons de la baisse du militantisme

Les Ordonnances Macron ont fait disparaitre les mandats de DP et de CHSCT, qui étaient une porte d’entrée au militantisme syndical, et de vrais viviers pour les syndicats. Bien sûr, et cela n’aide pas, le collectif de travail a quasiment disparu.

Et Outre-Manche ?

Les syndicats anglais ont des syndiqués, mais très peu de militants. En Grande Bretagne, coexistent 2 sortes de syndicalistes :

  • Les salariés des Organisations syndicales
  • Les militants qui sont principalement dans les structures publiques où il y a un potentiel d’adhérents, ou ont très peu de moyens dans le secteur privé où les syndicats ne sont pas toujours reconnus

Les syndicats sont considérés comme une « assurance » et offrent des services, comme chez les sage-femmes, où le syndicat tient également le rôle d’association professionnelle. Ils fournissent un service juridique en cas de faute professionnelle et des formations. Ils sont « professionnels » et communiquent de façon professionnelle, sur des sujets de société, comme l’environnement, la défense des services publics, l’égalité H/F, plutôt que la relation à l’employeur, avec des campagnes de publicité, comme Unison https://www.unison.org.uk/ .

En France ?

Le vrai combat que doivent tenir les syndicats français ? Retrouver un vrai droit syndical, des ressources et des moyens. Les ressources diminuent, surtout dans l’interpro. Il ne faut plus tenir une logique de chapelle.

Pour retrouver des adhérents, les syndicats doivent se renouveler, retrouver de l’inspiration, du souffle. Ils apparaissent comme trop institutionnels, opaques dans leur fonctionnement, avec des sujets trop spécifiques, trop centrés sur les questions de travail.

Ils auraient besoin d’être identifiés sur des causes. Car les causes, c’est ce qui parle aux jeunes.  Les syndicats ne répondent pas aux aspirations des jeunes salariés, qui ont une demande forte d’engagement. Ils ne trouvent pas de lieux d’expression, pas chez les syndicats en tout cas. »

A nous de nous réinventer…

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