LES INQUIÉTUDES DE LA CFTC
Que va devenir le groupe Lagardère et ses trois pôles (Hachette, travel retail et media) après l’OPA prévue par Bolloré ? La CFTC reste particulièrement vigilante au devenir de tous les salariés du groupe. Elle suit de près les avancées des négociations et s’inquiète du manque de concertation avec Arnaud Lagardère.
La CFTC, par la voix de ses élus qui siègent au comité de Groupe, a alerté à plusieurs reprises Arnaud Lagardère sur les risques encourus par le groupe Lagardère après la prise de pouvoir de Vivendi et de Vincent Bolloré sur celui-ci. Mais, englué dans ses dettes personnelles, dont il veut se débarrasser, Arnaud Lagardère n’a pas voulu entendre nos inquiétudes légitimes.
L’OPA à venir semble déjà entraîner des conséquences :
• Depuis septembre 2021, sur Europe1, la matinale du week-end est prise en mains par CNews. Les départs sont déjà nombreux.
• Un PSE (Plan de sauvegarde de l’emploi) est en cours portant sur la fermeture de 27 cabines news des stations Virgin Radio et RFM en régions et trois studios principaux du réseau local Virgin Radio ; 34 postes sont en jeu.
Si aucune corrélation ne peut être faite directement entre ces faits et l’OPA (les taux d’écoute des radios en baisse provoquent des baisses de revenus publicitaires), la temporalité des événements inquiète. Aujourd’hui, la CFTC ne peut que réitérer ses craintes sur les conséquences de ce rapprochement.
Quel sera l’avenir des salariés ? Quelle casse sociale ?
Dans la branche de l’édition, Hachette Livre (Hachette tourisme, scolaire, livre de poche, Grasset, Fayard, Larousse) et Editis (Plon, Robert Laffont, Le Cherche Midi, Bordas ou Nathan, Pocket) sont en concurrence. La CFTC craint qu’en cas de position monopolistique, des entités éditoriales soient vendues. Qui tirera profit du mercato de l’édition ? Et pour les fonctions support, des choix inquiétants se profilent, notamment pour les commerciaux, la distribution. Les élus CFTC seront très attentifs aux dégâts sur l’emploi dans les fonctions transversales comme la comptabilité, les employés de la fabrication et, bien sûr, la diffusion.
Quels seront les effets pour les points de vente ?
Hachette et Editis représentent la moitié des revenus du secteur de l’édition tricolore, plus de 50 % des volumes d’achat des libraires (et jusqu’à 90 % des ouvrages distribués par les petits points de vente).
Le groupe Vivendi (Bolloré) va devoir présenter aux autorités françaises (le CSA) et à la Commission européenne un plan pour éviter l’écueil du monopole en cumulant les deux plus gros diffuseurs et distributeurs en France. Leur fusion créerait une position dominante telle, qu’elle est impensable ; car quelle latitude auraient les points de vente sur le choix des ouvrages, avec un seul circuit de distribution, qui aurait un pouvoir considérable sur eux en termes de conditions commerciales et service rendu ?
Les magasins des gares et aéroports, le travel retail, ont subi des pertes considérables depuis le début de la crise sanitaire et, de ce fait, des coupes sombres dans les effectifs. La reprise s’amorce, mais quel sera le sort de cette branche si particulière du Groupe ?
Vers une pluralité en danger ?
Avec une hyper concentration des maisons d’édition, des médias (Lagardère, c’est le JDD, Paris Match et Europe 1 ; Bolloré c’est la maison-mère d’Havas, de Gameloft, de Canal+, C8, CNews et des magazines Prisma Media), que vont pouvoir entendre, lire et voir nos concitoyens ? La voix de son maître ? Une autre inquiétude est pour la liberté éditoriale des éditeurs. Hachette LIVRE, qu’Arnaud Noury a dirigé pendant vingt ans jusqu’au printemps dernier, laissait toute latitude dans les choix des ouvrages à publier à ses maisons d’édition, ce qui ne semble pas le cas chez Editis. Cette puissance quasi monopolistique a de quoi inquiéter toute la chaîne éditoriale française, depuis les libraires jusqu’aux imprimeurs en passant par les autres groupes éditeurs (sauf peut-être ceux qui, déjà, guettent ce qui tombera de la table). Les préoccupations premières seront de limiter au maximum la casse sociale au niveau des salariés, de maintenir des outils et unités de travail, ainsi que de conserver l’esprit d’indépendance qui existe dans les branches du Groupe Lagardère.
AUGMENTATIONS SALARIALES, DES PERSPECTIVES 2022 PLUTÔT ENCOURAGEANTES
Nous ne sommes plus en guerre, mais en croissance ! En 2021, le plan de relance et de soutien économique a dynamisé la reprise, ainsi que le plan de vaccination massive. Pourtant, l’inflation n’a pas été aussi haute depuis longtemps. Après près de deux années de disette en matière d’augmentation salariale et d’intéressement, la NAO (Négociation annuelle obligatoire) 2022 devrait être plus intéressante…
Des arguments pour la négociation :
• Pour l’ensemble des pays, 2021 devrait être l’année du rebond. La France enregistrerait une progression de son PIB de +6% en 2021, soit un niveau supérieur à la moyenne de l’Europe sur la même période (+5%).
• Les entreprises connaissent un rebond de d’activité et de leur trésorerie. Toutefois, l’inflation des matières premières et des coûts d’approvisionnement pèsera sur les résultats, ainsi que la fin des aides gouvernementales pour les secteurs qui ont été particulièrement affectés par la crise sanitaire • Le pouvoir d’achat des salariés est en légère baisse de -0,1% sur le 1er semestre 2021. Sur l’ensemble de l’année, les prévisions font état de :
• un taux d’inflation en moyenne annuelle de de 1,9%. (2,1% à fin septembre)
• une augmentation des salaires de 1,7% selon une enquête de Deloitte auprès des directions des ressources humaines (DRH)
Exceptionnellement, suite à la forte flambée des prix, le SMIC a été revalorisé en cours d’année en 2021 : +2,2% au 1er octobre 2021.
Il faut donc aider les salaires, au-delà de l’inflation en 2021, en particulier dans les sociétés ayant connu des gels de salaires ou des baisses de pouvoir d’achat ces dernières années et en prenant en compte des exonérations de cotisations sociales et fiscales dont les entreprises ont bénéficié. (À noter une continuation de la baisse du taux d’impôt sur les sociétés et la poursuite du plan de relance de 30 milliards d’euros pour les aides à l’embauche et le soutien à l’emploi et à la formation prévues par le Gouvernement en 2022). Point positif pour le pouvoir d’achat : la poursuite de la suppression de la taxe d’habitation.
• La prise en compte des résultats du calcul de l’index d’égalité homme / femme par des mesures de correction des écarts de rémunération.
• L’indemnité inflation de 100 euros par salarié a été annoncée sous conditions.
• Les entreprises les plus exposées à la pénurie de compétences, industrie et biens d’équipement, ont besoin d’augmenter les salaires pour attirer les talents.
Les perspectives sont encourageantes. Avant de se lancer dans la négociation, il est préférable d’estimer la situation économique et financière (avantages fiscaux et sociaux) de votre entreprise. Avec un record historique de 60 milliards d’euros de bénéfices au premier semestre 2021 pour les entreprises du CAC 40, les grandes entreprises auront du mal à dire qu’elles n’ont pas les moyens, mêmes si certaines estiment devoir geler les salaires cette année en l’absence de “perspectives claires” (enquête du cabinet LHH de septembre pour le Journal du Dimanche ou JDD).